BOK!
Très sévèrement accueilli par la presse spécialisée, le premier album de My Best Fiend (Warp Records) a été rudement mis à l’épreuve hier soir sur la scène du 22 d’Auron. Seuls les courants d’air froids et insistants ont joui en parfaite liberté de la prestation des New Yorkais, navigant allègrement entre…ben rien, en fait, y’avait personne. Personne sauf moi et quelques curieux qui ont su dépasser leurs à priori (et rentabiliser leurs billets au max) pour venir voir comment se défendait le groupe sur un plateau. Je ne sais pas ce qu’ils en ont pensé, les applaudissements et autres « whou-whou » étaient plutôt timides et faisaient écho à un Fred Coldwell gêné et avare en grands discours. Voilà pour les intermèdes. Intéressons-nous à la matière maintenant. Car si il est vrai que le studio n’a rien de très inventif et qu’on y décèle des influences marquées au point de frôler le plagiat, les compositions prennent très nettement de la hauteur sur scène. Une pop psyché fragile et naïve, toujours sur le fil, qui s’installe grossièrement sur des mélodies à l’eau de rose pour finalement y sauter à pieds joints et éclabousser les sceptiques. La fragilité, le manque de justesse, les imperfections d’élocution concourent à donner corps au set, qui, une fois qu’il a décollé, parade en apesanteur. Que les plus dubitatifs s’y attardent quelques minutes: My Best Fiend est l’illustration parfaite d’un groupe que la scène transcende et amplifie, même devant une salle dépouillée.
Ambiance beaucoup plus chaleureuse et tamisée dans la salle d’à côté où les King Krule sont attendus comme les messies de ce Printemps. Rien d’étonnant. Celui qu’on attend plus particulièrement et qu’on ne présente plus c’est Archy Marshall aka Zoo Kid, cette espèce d’ovni à peine majeur, virtuose de la guitare à la voix miel-acide, compositeur hors norme et inventeur de la « Blue Wave », un courant qui lui est propre, à cheval entre le jazz, le blues-punk et d’autres sphères inexplorées. Tout ce qui émane des doigts, des cordes, des yeux, des cheveux roux de Marshall s’inscrit instantanément dans un florilège qui marquera l’histoire de la musique d’une empreinte indélébile. King Krule s’éveille et fait trembler par son génie déconcertant, secoue, ébranle une assistance qui se serait sûrement foutu de sa gueule back in the days sur les bancs d’un lycée Londonien pérave. Au lieu de ça, c’est un respect tétanisant qui vient figer l’auditoire et le temps, une rencontre du troisième type à la fois angoissante par ce qu’elle renferme d’inconnu mais jouissive par ce qu’elle procure en admiration. Exit le superficiel et les ornements, rien qu’une aura et une maturité artistique ahurissante qui mettent tous types de commentaires à l’amende. Allez, je me tais et j’absorbe.
AMEN.
Pour aller plus loin:
– http://mybestfiend.com/HOME.html
– http://www.myspace.com/mybestfiend
– http://www.myspace.com/zookid